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Rylee Restoule comble les lacunes en santé pour les communautés autochtones du Nord de l’Ontario

Rylee Restoule comble les lacunes en santé pour les communautés autochtones du Nord de l’Ontario

2025/06/23

<Horizon Santé-Nord et l’Institut de recherches d’Horizon Santé-Nord sont fiers d’honorer et de célébrer la Journée nationale des peuples autochtones le 21 juin. Dans l’esprit du respect et de la solidarité, nous mettons en vedette un membre du personnel dont la mission est de fonder et de mener une équipe de recherche axée sur les voix, les besoins et la santé des Autochtones dans un système qui les a longtemps laissés pour compte.>

La première fois que Rylee Restoule a mis les pieds sur le campus de l’Université Laurentienne, c’était une jeune ojibwée de la Première Nation de Dokis maîtrisant le français et très consciente de son identité des Premières Nations, mais qui cherchait tout de même un lien plus profond avec sa culture.

Aujourd’hui, elle est titulaire d’une maîtrise en études sur la santé, gère une petite entreprise axée sur les Autochtones et contribue à modifier la façon dont le système de soins de santé du Nord de l’Ontario dessert les peuples autochtones.

Son parcours a été sinueux. Elle a grandi à Sturgeon Falls, une communauté principalement française et surtout blanche, tout juste à l’ouest de North Bay. Son père travaillait dans le domaine de la gouvernance des Autochtones en matière de santé; il lui a ainsi inculqué la fierté de leur identité, mais les pratiques culturelles telles que les pow-wow, la broderie perlée et les cérémonies traditionnelles n’ont pas régulièrement fait partie de son enfance.  

« Nous avons toujours su que nous étions membres des Premières Nations, a dit Rylee. Mon père nous l’a communiqué. Mais en grandissant, nous ne chassions pas et ne dansions pas lors de pow-wow. Ça viendrait plus tard, par suite de ma propre quête. »

Ce parcours a véritablement débuté durant ses études postsecondaires. Après deux ans d’études en promotion de la santé en français à la Laurentienne, son programme a été abruptement éliminé durant la crise d’insolvabilité de l’université. Elle s’est donc inscrite en biologie à l’Université Trent, avec un accent sur les sciences de la santé. C’est là, entourée d’autres étudiantes et étudiants ainsi que de personnel enseignant autochtone, qu’elle a commencé à participer à des cercles de broderie perlée, à des groupes de couture et à des cérémonies traditionnelles.

 « C’est là que j’ai vraiment commencé à m’imprégner de ma culture, a-t-elle dit. Je n’ai pas grandi dans ma culture, j’ai choisi de m’y investir. »

Elle a ensuite fait une maîtrise en arts à l’Université Athabasca, se spécialisant en recherche en santé. Bien que le programme ne soit pas fondé sur une thèse, elle a façonné chaque projet autour de la santé des Autochtones. Son travail a porté sur les disparités dans le domaine de la santé, la déconnexion culturelle et l’insuffisance de données spécifiques aux Autochtones dans le paysage élargi de la recherche en santé.

Les lacunes en recherche

Rylee est maintenant coordonnatrice de la recherche sur la santé des Autochtones de l’Institut de recherches d’Horizon Santé-Nord (IRHSN) à Sudbury. Son mandat? Mettre sur pied et diriger une équipe de recherche axée sur les voix des Autochtones, leurs besoins et leurs résultats en matière de santé, dans un système qui les a longtemps ignorés.

Une de ses premières initiatives, c’est la recherche sur les rôles et l’effet des intervenants-pivots auprès des patients autochtones. Ces personnes aident les patientes et les patients autochtones à accéder à des services, à gérer la logistique de leurs déplacements et à se sentir en sécurité sur le plan culturel pendant l’obtention de soins dans les milieux hospitaliers, ce qui pourrait sinon être des situations aliénantes ou intimidantes.

« Pour quelqu’un qui provient d’une Première Nation éloignée, arriver dans un grand hôpital urbain, c’est difficile. Il y a des barrières linguistiques, des différences culturelles, voire une peur ancrée dans les traumatismes historiques. Les intervenants-pivots aident à combler cette lacune. » 

Selon Rylee, bien que sa propre expérience en tant que femme autochtone dans le domaine des soins de santé ait été grandement positive, cela n’est pas habituel.

« Je connais le système. J’ai un réseau de soutien. Mais pour bien des gens, le simple fait de se rendre à l’hôpital constitue un défi énorme », a-t-elle dit.

La recherche de Rylee constitue un complément à plusieurs des objectifs clés d’HSN qui sont énoncés dans le nouveau plan stratégique quinquennal, Ensemble pour vous 2030. HSN entend s’attaquer aux problèmes d’équité liés à la santé en favorisant un environnement inclusif exempt de racisme, de discrimination et de toute forme de préjugés, tout en interagissant sans cesse avec les communautés autochtones et leurs organismes de santé afin de raffermir les relations et de concevoir des démarches permettant d’accroître la disponibilité de soins holistiques et adaptés sur le plan culturel ainsi que l’accès à ceux-ci.

Les inégalités héritées du colonialisme et les obstacles systémiques

La méfiance qu’entretiennent bien des Autochtones à l’égard du système de soins de santé n’est pas sans fondement. L’héritage des pensionnats autochtones du Canada, les hôpitaux autochtones et les expérimentations médicales sur les enfants autochtones ont créé des traumatismes générationnels et un profond scepticisme envers les établissements.

Même aujourd’hui, des enjeux systémiques persistent. Il y a un manque de politiques à l’appui des pratiques de guérison traditionnelles dans les hôpitaux. L’inclusion culturelle est parfois mentionnée dans les plans stratégiques, mais sans cadre officiel ni sensibilisation du personnel, souvent, ces initiatives ne sont pas à la hauteur.

« Il n’y a pas de politiques claires sur l’intégration de la médecine traditionnelle, la façon de composer avec les risques d’interactions médicamenteuses ou le respect des préférences culturelles d’une patiente ou d’un patient en milieu médical. Ces lacunes créent de la confusion et pire, davantage d’obstacles. »

Selon Rylee, des changements importants commencent par l’élaboration de politiques fondées sur la recherche, celle-ci étant dirigée par les communautés autochtones.

Artisanat, culture et guérison communautaire

Par ailleurs, Rylee gère aussi une petite entreprise qui confectionne et vend des jupes à rubans, des chemises à rubans, des boucles d’oreilles perlées et d’autres objets culturels faits à la main. Ce qui était au départ un passe-temps personnel est rapidement devenu une activité plus significative.

« Il y a un sentiment de fierté lorsqu’on porte quelque chose nous représentant. Je voulais aider les autres à vivre cela aussi, surtout les personnes qui n’étaient pas liées à leur culture en grandissant. »

Cette année marque aussi l’amorce d’une autre grande étape : elle confectionne maintenant sa propre robe à clochettes et danse lors des pow-wow.

« On dit que les pow-wow sont guérisseurs et c’est vraiment le cas. On y est entouré d’une communauté, de culture, de nourriture et de musique. C’est un bon remède. »

Un regard vers l’avenir

Bien que sa carrière soit encore jeune, Rylee a déjà un impact. Diplômée de première génération créant des liens culturels, c’est aussi une chercheuse ayant une mission. Les gens le constatent. De jeunes membres des familles lui demandent maintenant son avis sur les écoles, les programmes et les objectifs de vie, a-t-elle dit.

« Je suis très fière qu’on me perçoive comme quelqu’un vers qui on peut se tourner. Je veux mettre à profit mes privilèges, à savoir l’éducation, le soutien et l’accès, afin d’ouvrir des portes pour les autres. »

Son objectif à long terme? Contribuer à créer un système de soins de santé dans le Nord de l’Ontario dans lequel chaque patient autochtone se sentira en sécurité, respecté et vu, dans lequel la culture n’est pas seulement un ajout, mais un volet au cœur des soins.

« Il y a encore beaucoup à faire, dit-elle, mais nous avançons. »